Conférence carbone au Campus vendredi 15 octobre, première pour le Campus, qui travaille sur ce sujet depuis plus d’un an. Ce fut l’occasion de présenter les avancements du projet et d’échanger avec un public varié.
Comment rendre compte de l’évolution du projet depuis les premières mesures effectuées à l’été 2020, quelles furent les étapes importantes de cette recherche action ? Une trentaine de personnes dont des professionnel·les de la mesure carbone nous ont interrogés sur nos choix et nos résultats. Et quels sont ces choix ? Le premier a été de ne plus parler de « neutralité carbone », mais de s’inscrire dans la méthodologie Net Zero Initiative (NZI), portée par le cabinet Carbone 4. Il parle plutôt de « contribuer à la neutralité carbone au niveau mondial », et en dépassant l’échelle de la structure isolée.
Pour information, la NZI suggère de s’appuyer sur trois piliers, avec pour chacun une comptabilité propre :
- le pilier A : réduire les émissions GES de la structure
- le pilier B : contribuer à réduire les émissions chez les autres
- le pilier C : augmenter les puits de carbone
Au vue des priorités, l’équipe du Campus a fait le choix, pour l’instant, de se concentrer uniquement sur les deux premiers piliers. Ce 15 octobre nous nous sommes surtout concentrés sur la question: « Comment réduire nos émissions de gaz à effet de serre pour tenir nos engagements climatiques ? » Et pour répondre à notre public nous avons rendu compte de nos pratiques, nos questionnements pour tenir une trajectoire de réduction notable. La question de quantifier, non seulement les gaz émis mais aussi ceux évités s’est naturellement retrouvée au cœur des débats.
Pour mesurer cela, le défi est d’avoir une méthodologie permettant des mesures à la fois fiables, répétables dans le temps (puisqu’il s’agira de mettre à jour les émissions tous les ans ou tous les deux ans) sans être trop énergivores pour les personnes qui doivent assurer la collecte et le traitement des données. C’est à cette tâche que se sont attablés respectivement durant leurs deux services civiques Florent Haffner et Florent Husson. Ce choix de méthodologie a été un pas important. Il existe bien des méthodologies dont celle officielle de Bilan CarboneⓇ, fixée par l’Ademe. Seulement, développées pour des entreprises avec des émissions amonts, avals, et internes à l’entreprise, elles ne correspondaient pas à la répartition des émissions du Campus. L’accompagnement du Cabinet spécialisé Carbone 4, en mécénat de Compétences de mars à août, a débloqué la situation. Une autre répartition, par postes, nous a permis de trouver des leviers de réduction : l’alimentation, la mobilité, le logement, et les achats de biens et services.
Concernant ce pilier A, le Campus s’est fixé deux objectifs :
- Apprendre à mesurer, réduire puis maîtriser nos émissions (activités concernant uniquement l’association, donc hors vie personnelle des habitant·es)
- Diffuser / Témoigner de nos apprentissages auprès de différents publics (et donc avoir une comparaison possible, par exemple avec le bilan carbone d’une personne française moyenne)
Alors qu’avons-nous mis en œuvre ? Nous pouvons déjà nous appuyer sur une belle expérience de cuisine végétarienne, mutualisation des équipements, sobriété sur le chauffage des bâtiments… Une sensibilisation et une organisation spécifique avait d’ailleurs été mise en place auprès des participant·es à la conférence pour que leur déplacement pendant cette journée émette le moins de CO2 possible ; il.elle.s ont bien joué le jeu et nous les en remercions vivement !
Concernant les actions de réduction à venir, le Campus pourra justement aller creuser du côté mobilité en proposant un « système vélo » plus facile d’accès et plus développé afin de limiter les déplacements en voiture (en lien avec le projet de Recherche-Action mobilité, qui a aussi été abordé à la fin de la conférence).
Une discussion sur les trajectoires de réduction, a permis aux participant·es d’aborder d’autres questions comme les actions collectives, la régulation, ou les inégalités de répartition des émissions en fonction des classes sociales.
Alors sommes-nous en mesure de nommer nos émissions évitées au Campus ? Le campus est une institution qui grossit fortement, à la fois en nombre d’habitant·es sur place, en nombre de personnes accueillies, et en projets portés, et qui en ce sens aura beaucoup de mal à réduire ses émissions en absolu. L’enjeu est bien de trouver un équilibre entre les enjeux de réduction et la réalisation de sa mission principale « former pour transformer ». Interdire aux groupes de venir en voiture, ou ne pas chauffer les bâtiments serait sûrement efficace d’un point de vue émissions, et contre-productif d’un point de vue d’intégration. L’équilibre « Radical et non marginal », nous guide pour ne pas se fermer à un public large.
La conférence nous a donné l’occasion de présenter les résultats préliminaires d’une enquête exploratoire sur les émissions évitées, coordonnée notamment par Hélène L’huillier, membre du Campus spécialisée sur les questions d’impact social. Cette enquête, réalisée sous forme de questionnaires envoyés aux personnes qui sont passées au Campus (en formation, en bénévole…) nous a permis par exemple d’identifier qu’après leur passage, plus d’une personne sur deux ayant répondu a vu sa consommation de viande baisser. L’effet de la délicieuse cuisine végétarienne du Campus y serait-il pour quelque chose ? En moyenne, 38% des gens ont moins chauffé leur logement, l’utilisation des bouillottes est assurément une expérience d’hiver inoubliable au Campus. Ces résultats, qui ne sont en aucun cas des impacts directs, mais des évolutions moyennes de situations, nécessitent d’être creusés, affinés et confrontés à des retours qualitatifs. Une question de recherche originale pourra être formulée ainsi :
Quel point d’équilibre ? Quelles tensions entre l’objectif de minimiser les émissions du site et celui de maximiser les émissions évitées chez les visiteur·ses ?
Le projet MC2, reposant pour l’instant très largement sur du bénévolat et des jeunes en services civiques devra trouver d’autres moyens. Pour se donner la possibilité de creuser cette question, il nous faudra sûrement envisager des partenariats avec des laboratoires académiques, des chercheur·ses ou de nouveaux soutiens bénévoles.
Pour sa part, le projet mobilité, autre axe de recherche action du Campus financé par la Fondation d’Entreprise Michelin, vise à proposer des solutions bas carbone et inclusives pour les habitant·es du territoire de Montereau. Il a aussi un volet de mesure d’impact, notamment en termes de réduction carbone. Il est donc prévu d’estimer les émissions évitées en mesurant par exemple le report modal induit chez les participant·es aux ateliers de réparation et d’autoréparation proposés par ce projet.
Un grand merci à toutes les personnes ayant participé de près ou de loin à la tenue de cette conférence, notamment André Pouget qui y a beaucoup contribué ainsi qu’aux personnes venues y assister. En espérant que ce partage a été utile et nous permettra à tous et toutes d’avancer sur ce chemin de la réduction carbone. On vous donne rendez-vous pour la prochaine conférence carbone, d’ores et déjà prévue en 2024 pour vous présenter nos avancées d’ici là !
Article co-rédigé par Florence Drouet et Mélanie Visignol.