Témoignages : l’envol post-Campus


« En un sens, le Campus n’existe et ne perdure que grâce à l’extraordinaire maillage de bonnes volontés, de dons et de compétences qui ont contribué au projet depuis l’intuition initiale en 2016 », introduit Cécile Renouard, présidente du Campus, dans le rapport moral 2020 de l’association. Au Campus, le volontariat bat en effet son plein et constitue une dimension essentielle du projet. De nombreux volontaires choisissent de s’engager dans un temps plus ou moins long illustrant l’économie du don chère à l’association. Que ce soit pour quelques semaines, plusieurs mois, voire années, ils sont nombreux.ses à donner de leur temps, énergie et talents avant d’emprunter d’autres chemins de transition. A l’instar d’Emeline Baudet, forgeoise investie depuis la naissance du Campus en 2018. Voici son témoignage.

“La beauté du projet est justement de laisser tout le monde se créer sa place et son rôle sur mesure”

Emeline Baudet

Après trois ans dans la communauté du Campus de Forges… quelques réflexions à la suite d’un envol qui n’est pas un adieu !

Ces quelques lignes ne suffiraient pas à épuiser la totalité de ce que j’ai pu vivre à Forges et pour le Campus, tant ces années ont été denses en événements et chargées émotionnellement. Il s’agit plutôt, à chaud et alors que se profile mon départ vers une nouvelle vie, de retracer les impressions qui m’ont accompagnée dans l’apprentissage d’une vie en communauté unique en son genre.

Lorsque j’ai entendu parler du Campus pour la première fois, le domaine de Forges venait à peine d’être « choisi » par l’équipe des pionniers de l’aventure ; j’y suis allée, alors, par pure découverte, sans soupçonner que je serais amenée un jour à y poser mes valises. Nous étions alors à la fin du mois de janvier 2018, par une froide journée d’hiver qui englue les gens et les choses dans une grisaille déprimante. Le château était alors laissé à l’abandon depuis deux ans, les sols recouverts de poussière, et je me souviens encore de l’impression post-apocalyptique qui régnait dans les anciennes salles de cours du collège et des communs. D’imaginer que ce lieu se transformerait en petit paradis en moins de six mois relevait au mieux du rêve, au pire d’une folle utopie.

Mais le miracle a eu lieu. Quelques mois après cette première visite surprise, les travaux de rénovation et de nettoyage du château ont profité du printemps naissant pour se lancer ; j’y ai participé et, à la faveur d’un déménagement forcé, l’idée saugrenue de venir habiter sur place m’est alors apparue avec la simplicité de l’évidence. Après discussion avec Cécile et le bureau, j’ai eu la grande joie d’être acceptée dans cette première communauté et d’avoir la chance, au fil de l’été, d’emménager avec les autres « Forgeois »!

S’ensuivirent des mois de travaux, de potager, de course après les poules dans le poulailler pour les faire rentrer avant la nuit, d’allers-retours assez fatigants entre Forges et Paris où j’étais inscrite en thèse et où je travaillais en semaine… mais surtout, d’amitiés merveilleuses et inégalées. Cécile, Hélène, Xavier de Bénazé et Xavier Ricard, premiers compagnons de route, auxquels se sont adjoints bientôt Rémi, Inès, Manoëlle, Hélène Leclerc… et tant d’autres bénévoles et Wwooffeurs venus du bout du monde ou de l’autre côté de la ligne R, dans ce projet ahurissant d’ambition et de justesse.

Entre 2018 et 2021, de cinq, le château a connu dix, quinze, puis désormais vingt-cinq habitants en moyenne. Plusieurs cercles communautaires se créent, qui permettent à chacun.e, selon la durée de son engagement pour le Campus, de trouver un équilibre et une juste participation aux réflexions et décisions qui y sont prises. La beauté du projet est justement de laisser tout le monde se créer sa place et son rôle sur mesure : les initiatives sont encouragées, tant qu’elles s’inscrivent dans la stratégie globale définie en commun, surtout si elles permettent d’aider à l’épanouissement individuel à travers le collectif. Par exemple, j’ai moi-même eu la particularité d’habiter à Forges de manière permanente mais de ne pas y travailler en continu ; je passais beaucoup de temps à Paris pour mes recherches de thèse et mon travail à l’AFD (Agence Française de Développement), et lorsque j’avais la chance de rester plusieurs jours en continu à Forges, c’était souvent pour rester enfermée à… travailler sur ma thèse, toujours. Avec, tout de même, un petit tour à la cuisine ou dans les champs alentour. Malgré cela, mon rôle dans la communauté n’a jamais été remis en question, et la prise de distance qui était la mienne vis-à-vis du projet a même pu être valorisée pour le recul critique qu’elle autorisait parfois. En d’autres termes, j’ai été acceptée à part égale, malgré l’impression d’une contribution moindre au projet. Pour cela, ma reconnaissance et ma gratitude aux autres membres du collectif sont totales : sans vous, sans votre soutien, votre confiance et tout votre appui, je n’aurais sans doute pas terminé ma thèse dans des conditions aussi heureuses.

D’une manière générale, tout ce que j’ai vécu, observé, encouragé, parfois initié, et beaucoup admiré, à Forges, me servira de tremplin pour la suite. Ma formation académique parvient à son terme ; ma formation humaine, elle, est toujours en pleine évolution et transformation, et ne pourra se construire que par et pour les autres. C’est ce que m’a appris mon aventure au Campus… qui ne fait donc que commencer, à l’échelle d’une vie 😉

Emeline

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