Retour sur la 1ère saison au potager – 2022 : « Poétiser le quotidien »


Une année s’est écoulée depuis que Timothé, alias Tim, s’est emparé de l’un des joyaux du Campus : le potager. Une année c’est court, on vous l’accorde. Toutefois, pour un maraîcher, c’est un cycle : quatre saisons, un enracinement, un voyage. Voyage dans lequel Tim souhaite vous plonger grâce à sa fine plume.

« Poétiser le quotidien »

« Tête-corps-cœur, trio gardien des souvenirs de cette première année comme jardinier du Campus de la Transition : des images de mots imaginés du crayon à papier à la 3D du potager, des rêves sans limite qu’une limite de caractère ne saurait justement restituer. Pour tenter d’être exhaustif sur ces quinze derniers mois au vert, j’ai d’abord dressé une liste à la Prévert, même si ça n’est pas ce que je préfère. Et si j’y mettais un peu de liant, un peu de complexe argilo-humique, ça donnerait quelque chose comme…

Automne 2021. Après un étonnant voyage nomade à vélo, je sème la graine de mon arbre dans une terre de Marne, l’arrose d’un peu de Seine et me met à rêver en la regardant germer, déployer sa tige et se ramifier sous mes soins. Cette tige, c’est le potager-mandala du Campus, cœur de mes activités ; ses branches, les mille idées qui en sont nées.

En dessinant ce potager inspiré de la permaculture (synonyme de bon sens paysan), je m’improvise architecte « paysangiste ». De là, une multitude de créations voit le jour : un jardin anglais convivial se jouxte au potager avec son salon vivant en bottes de paille cultivées – eh oui, des tomates cerises poussent sur la table à manger ! Sur le parvis, passiflores et clématites assiègent le château, abreuvées de soleil et d’eau dans les jardinières à réservoir autonome. Mon acolyte Matthieu Vergnol, en Service Civique à mes côtés, s’investit corps et âme de son esprit doux et dingue et, ensemble, nous apprenons le métier de jardinier. Nous sommes fiers d’avoir récolté plus de 1,7 Tonne de légumes en six mois sur 530m2, soit une moyenne de 3kg/m2 – dont 900 kg de courges et courgettes, et une partie au profit d’Emmaüs !

Si l’objectif d’autonomie alimentaire n’en est pas un, le jardin se révèle être un excellent support pédagogique pour appréhender les enjeux agroécologiques. Des centaines d’étudiants suivent mes enseignements que je souhaite contrastés avec leur quotidien : le contraste crée l’émotion, et l’émotion marque la mémoire. Ma maquette pédagogique s’étoffe : histoire, enjeux et alternatives agricoles avec les étudiants de l’ICP, atelier d’analyse de sols avec l’ESSEC, introduction à la permaculture avec l’ICAM et les fonctionnaires de l’INET, reboucler les cycles de l’azote et du phosphore avec les T-Campeurs suivi de la co-construction de toilettes sèches modernes au château, visites et chantiers participatifs… le jardin est une vraie ruche, et le miel y est bon paraît-il ! Je me remémore le témoignage touchant d’un jeune étudiant du Bachelor ACT : « Tim, jardinier de mes rêves pour la vie. » Transmettre simplement le goût du jardinage me comble d’un profond sentiment d’utilité écologique et sociale.

Pourtant, il arrive que les fruits du jardin soient amers. Depuis mes premiers semis et encore aujourd’hui, j’affronte régulièrement mon démon intérieur, celui du perfectionniste exigeant, éternel insatisfait, traquant la chimère du « combo parfait » (plan de culture, je te hais mon amour… !) C’est le revers de l’expérience : plus je comprends les interactions bio-physico-chimiques d’un écosystème, plus l’infinité de paramètres rend complexe sa conception. Il m’arrive de finir énervé, épuisé ou encore écœuré… Alors pour m’apaiser, je m’inspire, je lis Le potager d’un rêveur (ed. Terre Vivante, 2022) du jardinier Xavier Mathias, fustigeur des « attrapeurs de rêves », ces dogmes, objectifs et recettes magiques qui menacent la paix naturelle des jardins. Mon credo : « fait, c’est mieux que parfait »

Mais déjà pour l’année 2023 les projets se bousculent dans le hall de mon imaginaire, répondant pour beaucoup à l’urgence de l’essentiel, comme l’installation de récupérateurs d’eau de pluie ou le recyclage de l’urine au potager – déjà 500 L récupérés grâce aux Campusiens et Campusiennes suite à une expérimentation sur site – et un éventuel projet de recherche-action sur cet enjeu planétaire qui m’anime plus que jamais. Après Matthieu, l’arrivée récente de Bertille au jardin et la dynamique créative d’une nouvelle génération de campusiens me mettent en confiance pour assumer mes responsabilités grandissantes et réaliser des rêves : décupler la productivité du potager, être autonomes en œufs, planter un grand verger-mandala ou encore accueillir du spectacle vivant sur la scène ouverte du potager ! En toile de fond de ces mille et une ambitions et pour ne pas perdre la raison, je tente de ne jamais oublier pourquoi je vais au jardin tous les matins : pour poétiser le quotidien. »

« Un jardin ne finit jamais », Gilles Clément.

Pour suivre les nouvelles du jardin :
Instagram @potager_campus_transition
Facebook : @Timothée Vernier

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